« Et merde, encore raté. » Le soleil s'était couché sur le labyrinthe, et une fois encore j'avais raté le coche des portes. Impossible pour moi de rentrer chez moi et rejoindre les miens. Les garçons n'auraient pas à s'inquiéter, j'étais en sécurité chez les filles, si on omettait Amalia qui voulait me virer à tout prix du bloc. Elle et sa rigidité légendaire, si je pouvais m'en passer ça m'arrangerait. Mais heureusement pour moi, j'avais plus d'amies que d'ennemies ici, tout simplement parce que j'avais su rester naturel. Ce n'était pas mon objectif, d'être faux avec les filles. J'étais très curieux de savoir comment elles avaient évolué ici, et pouvoir partager des outils et des connaissances, c'était toujours bon à prendre. Je me sentais bien, filles et garçons réunis. Ca me rassurait un peu plus quant à la perspective d'avenir. Et quand je ne pouvais pas rentrer au bloc des garçons, je savais où aller pour me dégoter un oreiller et un drap. J'évitais soigneusement le gniouf où Amalia adorait m'emmener de force. Je m'étais fait des alliées précieuses, et Nyx m'avait particulièrement sauvé la mise cette nuit. Elle m'avait donné un oreiller et une couverture qui piquait un peu, mais le froid s'était bien installé en cette saison hivernale, et ça me réveilla en pleine nuit. J'avais quitté la bâtisse à pas de loup, pour ne réveiller personne, et je m'étais rendu au bord de l'étang pour méditer un peu. Quand je n'arrivais pas à dormir, surtout à cause du froid, j'aimais beaucoup m'isoler pour réfléchir à ma condition de blocard. Mais j'avais échoué dans ma solitude, puisque plus tard Nyx était arrivée avec une couverture plus chaude. Sa présence me faisait du bien. Sa peau était douce et chaude, tout ce dont j'avais besoin. On s'était enlacés, et puis on avait partagé un plaisir au-delà même du corps. Nos ombres avaient dansé au bord de cet étang solitaire, et nos corps nus blottis l'un contre l'autre avaient suffi à réchauffer nos coeurs et nos esprits. J'avais donc fini ma nuit à l'étang avec Nyx, et même les premières lueurs du soleil naissant ne réussissaient pas à me réveiller. J'étais bien là, au pied de cet immense arbre, les oiseaux chantonnant pour célébrer la nouvelle journée qui s'offrait à nous les blocards. Je ne savais pas si Nyx était déjà réveillée, mais je me souvenais encore de la douceur de ses lèvres, et de la blancheur de sa peau de porcelaine.

Si Quinn n'avait pas pu rejoindre le bloc des mecs, moi je me portais comme un charme. Et pour cause, j'avais pu lui filer une vieille couverture qui était restée trop longtemps dans la paille. Rien que l'imaginer se gratter dans la matinée me donnait déjà le sourire, tout comme j'envisageais déjà de le prendre dans mes bras et de feindre l'innocence, pour grappiller un câlin incognito.

Sauf que monsieur n'arrivait pas à trouver le sommeil. Je l'avais regardé quitter sa couverture en douce, et je m'étais même demandée pendant plusieurs minutes pourquoi il sortait des draps pour aller crever de froid dehors. Drapée de ma propre couverture, je l'avais donc rejoint. Et telle la princesse qui rejoint son prince charmant, la petite phrase voulait qu'ils "eurent beaucoup d'enfants". Nous, on n'en voulait pas, mais on prenait ce qui venait en bonus. Finalement, à l'abri des regards indiscrets, je m'étais endormie blottie contre le corps de mon amant. Mes paupières refusaient de s'ouvrir, et je savais d'avance que j'aurais l'air horrible toute la journée qui venait parce que j'aurais le visage gonflé à cause du sommeil, et je n'avais pas dormi toutes les heures nécessaires pour conserver mon teint de pêche. Amen.

Tout en ronchonnant, je blottissais mon nez dans la nuque de Quinn, réalisant alors qu'il était encore là, et c'était tant mieux parce que je n'avais pas envie de me réveiller toute seule, ce matin. « Tu devrais rater la fermeture des portes plus souvent. » je plaisantais tout en passant mon index sur ses pommettes, parcourant mes doigts à la naissance de sa mâchoire. « tu penses à quoi ? » je me doutais que c'était sans doute quelque chose en rapport avec le bloc, avec le labyrinthe, les monstres qui l'habitaient, les autres blocards. Puisque nos vies ne tournaient qu'autour de ces sujets. Mais c'était juste pour le plaisir de lui demander, ainsi, quelque chose de purement banal. « tu t'es déjà demandé si on sortira un jour ? » j'ajoutais, tout en attrapant sa main et en la collant à la mienne. J'écarquillais les yeux en observant la finesse de ses doigts, puis suivais les lignes de sa main, massant délicatement ses phalanges.

La nuit était tombée depuis longtemps, et il avait enfin pu se libérer pour aller retrouver la jeune fille qui lui avait donné rendez-vous dans sa chambre. Parcourant le couloir aussi discrètement et silencieusement que possible, il arriva enfin devant la porte de sa chambre, et frappa doucement. La porte s’entrouvrit et une main vint saisir son bras pour le tirer à l’intérieur. Il se retourna pour voir son amie qui refermait la porte à clef. Il fronça les sourcils et ce n’est qu’après qu’il se rendit compte de l’ambiance étrange dans laquelle était plongée la chambre. Il faisait sombre, et quelques bougies avaient été allumées près du lit. Il se tourna à nouveau vers la jeune fille. « Qu’est-ce qui se passe? Pourquoi tu m’as donné rendez-vous aussi tard? » Il remarqua sa petite tenue mais fit mine de ne pas y faire attention. Elle s’approcha de lui, trop près. « Je veux que tu me fasse femme. « Q..quoi? » Il se demandait s’il n’avait pas mal entendu. « Écoutes, tu sais aussi bien que moi ce qui va se passer dans les prochains jours, alors… faisons le. Fais le pour moi. S’il te plait. » Il déglutit péniblement et la regarda hésitant. Bien sûr qu’il en avait envie, il l’aimait comme un fou depuis toujours et n’avait jamais osé le lui avouer et là.. elle lui proposait qu’ils fassent l’amour. Il en avait envie, mais était-ce correct? Est-ce ainsi que les choses devaient se passer? Ne devaient-ils pas faire l’amour après s’être tous les deux avoués leurs sentiments? D’ailleurs l’aimait-elle, elle? Il n’en savait absolument rien. Il voulut refuser, mais elle le pris de court en venant l’embrasser. Alors toutes ses hésitations s’évaporèrent dans l’air, et il passa ses bras autour d’elle, l’attirant contre lui, et lui rendit son baiser. Ce fut à lui aussi sa première fois, mais ce fut magique.

Mon rêve était étrange. C'était vraiment différent de tous les autres que je faisais depuis que j'étais au labyrinthe. J'avais une sensation de déjà-vu, et ma peau se hérissait quand j'étais cette voix. Elle m'était trop familière, mais je ne savais pas qui était cette fille. Je sentais que c'était réellement arrivé, et qu'il s'agissait d'une infime bribe de ma mémoire oubliée quand j'étais arrivé au bloc. Ce n'était pas désagréable, mais ce n'était pas non plus plaisant. Quand j'ouvris les yeux, je me sentais un peu nauséeux, parce que je me souvenais très clairement de ce rêve, mais le visage de Nyx me permit de remettre mes pieds sur terre et cela me rassura énormément. Ses mains se baladaient sur ma peau avec douceur. J'avais toujours aimé sa tendresse et la subtilité de ses gestes. J'émergeais paisiblement dans ses bras, humant son parfum dans le creux de son cou. Nyx était bavarde dès le matin, c'était une habitude. Sa voix était toute fluette et avait le don de me réveiller. Je la gratifiai d'un sourire, lui laissant le soin de masser mes phalanges. « Hum... Un jour on sortira, je pense. » J'étais optimiste. Ca faisait si longtemps qu'on était dans ce bloc, et on venait à peine de découvrir d'autres personnes en vie à l'intérieur du labyrinthe. Ce dernier recelait d'énormes mystères encore, et j'étais persuadé que la sortie en faisait partie. On sortirait, un jour, et je partageais surtout l'avis qu'ensemble, filles et garçons, on pourrait y arriver. Mieux valait s'entraider plutôt que s'entretuer, non ? Je glissai mes doigts dans les cheveux soyeux de Nyx, puis je me détachai un peu du sol mousseux pour lui offrir un baiser tendre, en signe d'affection et en recherche de sa douceur. « Tu n'as jamais eu une impression de déjà-vu dans tes rêves ? » Je clignai des yeux, curieux d'entendre sa réponse, alors que je m'appuyais sur mes coudes. Le soleil perçait dans le petit bois, et l'eau de l'étang ruisselait à nos pieds. C'était un paysage idyllique, quand on oubliait que nous étions prisonniers entre des milliers de murs.

J'haussais des épaules, puis hochais la tête lorsqu'il me fit partager qu'il pensait que les blocards arriveraient à sortir du Labyrinthe. Un jour. Ce genre de réponses lui correspondaient bien, même si de mon côté, j'étais beaucoup plus sceptique et que je restais convaincue que nous n'étions que du bétail. Pourtant, je souriais parce que je préférais nettement sa version de l'histoire qui correspondait franchement davantage à ma vision d'une vie de princesse qui se termine bien. « Si. » Je répondais à sa question. Bien sûr que si. Comme tout le monde. Je faisais par exemple ces rêves où je me faisais poursuivre par des bestioles dans le labyrinthe, et je mourrais. Ou je me faisais poignarder par une blocarde, et je mourrais. Ou ceux où je me faisais défigurer, et je me suicidais. « Si, c'est le genre de rêves qui se terminent par un réveil en sursaut, en vérifiant que personne ne t'a enfoncé un objet contondant dans le corps. » J'ajoutais pour exprimer ma pensée, même si je me gardais bien de lui dévoiler tous les exemples que j'avais sous la main de ce genre de rêves.

Je m'amusais à l'ébouriffer gentiment en déplaçant certaines mèches de ses cheveux délicatement. Cette tête ensommeillée, c'était mon petit plaisir du matin. Puis je glissais ma main derrière sa nuque, et répondait à son baiser par un autre plus passionné. De cette façon, peut-être que je réussirais à dissiper ses inquiétudes, ses peurs, et les miennes aussi. « On dit que depuis la réunion des blocs, les gens commencent à se souvenir de certaines choses. » Je marquais une pause pour avaler ma salive, et pour me laisser moi-même le temps de digérer cette information. « Des trucs de leur passé. » J'ajoutais, même s'il en avait entendu parler lui aussi. Et que la précision n'était sans doute pas nécessaire. Je me relevais doucement, pour le pousser délicatement, et une fois qu'il fut allongé sur le dos, je m'asseyais sur lui à califourchon. J'aurais pu jouer à la tentatrice, mais je me penchais juste pour déposer des petits baisers de la naissance de sa mâchoire jusqu'à son épaule. « Je n'ai pas envie de me lever un matin avec la sensation que je ne suis pas vraiment la personne que je pense être. » Je murmurais, glissant alors mes mains le long de ses épaules pour masser les muscles de son cou et de ses épaules.

Alors, je n'étais pas le seul à vivre ça. Tous les blocards commençaient à retrouver des bribes de leur mémoire. Ca me rassurait, je ne me sentais pas différent. Mais quand même, ce rêve me perturbait beaucoup. Malgré les paroles enjôleuses quoique pleines de sens de Nyx, je ne pouvais pas m'empêcher d'y repenser. Encore et encore. Cela semblait si réel, et si c'était vraiment mon passé qui ressurgissait, alors ce ne serait pas la première fois. Nyx avait bien dit que les blocards retrouvaient plusieurs parties de leur mémoire, non ? J'allais devoir m'y confronter de nouvelles fois à l'avenir. Mais étais-je vraiment prêt pour ça ? Je clignai des yeux, me poussant légèrement alors que Nyx prenait ses aises sous la couverture. Je m'allongeai sur le dos, puisque c'était dans ce sens-là que sa main m'orientait, puis je l'accueillis sur moi, son corps nu surplombant le mien. Avec les rayons du soleil qui perçaient le bosquet, elle avait tout l'air d'une déesse assise à califourchon sur moi. Je lui souris, savourant la délicatesse de ses gestes et la douceur de ses lèvres. Ses baisers m'enivraient. J'avais des frissons qui parcouraient toute mon échine. Naturellement, je vins placer mes mains sur ses reins, appuyant légèrement sur ses hanches pour presser son bassin contre le mien. Sa chaleur corporelle me faisait du bien, et sa peau était encore plus douce qu'auparavant. Mais Nyx avait peur. Peur de se réveiller un jour, hantée par les démons de son passé. Je glissai mon regard sur le sien, une main remontant sur sa joue pour dégager une mèche rebelle de son si joli visage. « Tu resteras toujours la même pour moi, Nyx... » Une princesse capricieuse qui sous ses airs de diva quémandant de l'attention en allumant les garçons, possédait un coeur et une tendresse inégalables. J'avais appris à la connaître sous ses apparences. Nyx me plaisait, parce que ce n'était pas si compliqué avec elle. Je me sentais en harmonie avec elle. Paisible. Je n'avais pas besoin de jouer un rôle quand je me retrouvais seul avec elle. Je pouvais être moi. Quinn. Un simple gars qui ne cherchait qu'à sourire même contre l'adversité.

Je souriais, malicieuse, lorsqu'il me répondit que je serai toujours la même pour lui. Je me penchais en avant, collant ma poitrine contre son torse, sans aucune honte car je n'avais besoin d'aucun artifice dans les bras de Quinn. Je nous enroulais dans les couvertures, pour éviter que la brûlure du froid de la matinée ne nous embrasse. « Peut-être que j'ai été quelqu'un d'horrible. » Je murmurais, à moitié amusée, rien qu'à cette idée. Je mordillais sa lèvre inférieure, avant de redescendre mes lèvres jusqu'à son cou où je faisais glisser ma langue le long de sa jugulaire. « J'ai sans doute brisé tes fiançailles pour pouvoir me t'approprier à moi seule. » Je continuais, parce que cela m'amusait de m'imaginer ce petit scénario dans ma tête. Vu mon caractère considéré détestable pour la majorité des blocardes, j'avais sans doute dû créer une situation de la sorte.

« J'ai été la tentatrice. » Je murmurais, tout en glissant mon corps le long du sien, déposant des baisers sur sa pomme d'adam, jusqu'à descendre peu à peu sur son torse, jusqu'en dessous de son nombril. « Je t'ai torturé. » Je caressais ses flancs, griffais ses côtes sensuellement. Je savais parfaitement à quel jeu je jouais avec lui, car c'était toujours ainsi. Et il faisait chaud sous les draps, je le provoquais. Je voulais lui faire payer le poids de ses paroles. Est-ce qu'il me connaissait si bien ? Le surplombant toujours, je lui offrais un regard malicieux, enroulant mes doigts dans les siens, jouant un coup la romantique amoureuse, et la fille facile sulfureuse l'instant d'après. « Bien sûr, ta fiancée est devenue verte de jalousie, lorsqu'elle a découvert notre sextape. » Je rajoutais en éclatant de rire.

Je mordillais son cou, je voulais le rendre fou, voir combien de temps il serait capable de résister face aux assauts que je lui faisais subir. Puis, je reposais mes lèvres tendrement sur les siennes, jouant le chaud et le froid. « Sextape que j'aurais moi-même caché sous son oreiller, juste pour lui donner des petits conseils. » Je ne pouvais pas m'empêcher de me vanter, et je ne pouvais pas arracher ce petit sourire en coin de mon visage. Et puis, j'étais si adorable que je l'avais fait pour lui rendre service ? Certainement pas. Mais l'idée me plaisait bien. Je le dévorais du regard, comme toujours.

Nyx fondait sur moi comme un prédateur fondait sur sa proie. Au pied de cet arbre au tronc si épais et aux racines déformant le sol mousseux, je me sentais prisonnier des charmes tentateurs de la belle blocarde. C'était Nyx. Une allumeuse de première, aux lèvres douces et à la peau de porcelaine. Elle avait un caractère difficile, en public, mais il ne fallait pas s'arrêter aux apparences pour la connaître. Nyx, c'était cette petite princesse qui, quand on savait la caresser dans le sens du poil, savait se montrer attentionnée et douce. C'était peut-être ça dont j'avais besoin pour évoluer dans le labyrinthe: que quelqu'un prenne soin de moi, tout comme moi je prenais soin des autres. Il était vrai que j'étais particulier généreux, et je proposais mon aide en toute circonstances. Au fond, je ne recherchais qu'un peu de reconnaissance et de réciprocité. Avec Nyx, je retrouvais ces deux aspects, et le sexe ne devenait que secondaire, tout compte fait. Bien que le plaisir de la chair était bien présent avec la plantureuse brune, je profitais surtout de son caractère. Son corps n'était qu'en option, je jouissais de nos échanges. Alors son petit jeu, insinuant que peut-être dans ce passé flou, elle aurait attisé les foudres d'une fiancée imaginaire, et bien ça me faisait rire. Ses baisers de plus en plus bas me procuraient des frissons nouveaux, d'une agréable sensation. Ses doigts glissaient dans les miens, ses cheveux tombaient en cascade sur mon torse alors qu'elle se redressait sur moi. Son monologue avait eu le don d'éveiller ma curiosité. « Parce que tu crois que nos passés sont liés ? » Je posai mes lèvres sur les siennes pour lui offrir un baiser plus passionné, plus abrupt car je finissais par lui mordiller la lèvre inférieure. Je dérivai mon visage sur sa mâchoire puis son cou pour lui offrir de nouveaux baisers, tous plus sensuels les uns que les autres. « Et si c'était toi, la fiancée ? Hein, tu aimerais ? » Bien sûr, je disais ça sur le ton de la plaisanterie, parce que nous ne partagions aucun sentiment amoureux. On se suffisait l'un à l'autre, sans y mettre du coeur. C'était juste de l'attachement, de l'affection. Mon coeur ne battait pas fort en sa présence. Disons que Nyx contribuait simplement à mon bonheur. Mais il était certain que son absence me ferait souffrir. « Ne te préoccupe pas de ce que disent les autres à ton sujet. Ca veut dire qu'ils ne te méritent pas. » finis-je par affirmer, afin de lui donner du courage et du réconfort. Je savais très bien qu'elle s'en fichait, c'était dans son tempérament, mais je ne voulais pas qu'elle doute d'elle-même une fois. Pas même actuellement, alors que son corps nu se dévoilait peu à peu sur moi, sous cette agréable couverture.

Il me cherchait, je le cherchais. Dans cette ronde diabolique, nous finissions toujours par nous trouver. Et tant mieux d'ailleurs, sinon la vie serait vraiment trop morose. Je riais à mon tour lorsqu'il me demanda si je voulais jouer le rôle de la fiancée, et j'haussais même les sourcils. « Ce n'est pas excitant d'avoir les choses telles qu'elles sont. » Délicatement, j'attrapais sa main, et déposais mes lèvres sur chacun de ses doigts, puis sur son poignet, continuant mon périple jusqu'au creux de son coude. « Ça l'est beaucoup plus de venir se servir. » Je soupirais. Parce que Quinn me donnait du fil à retordre. S'il avait simplement succombé à mes charmes, je me serais sans doute lassée de sa présence, un jouet parmi tant d'autre. C'est parce que notre complicité me fascinait que je continuais d'entretenir volontairement cette relation que j'avais avec lui. Il n'était pas qu'un bon coup en passant. « Je ne suis pas faite pour jouer des rôles secondaires. » J'ajoutais en jetant ma crinière brune en arrière. Parce que je pensais que je méritais mieux que le vulgaire rôle de la fiancée. Pas d'action, pas de sentiments. Juste une histoire de paquets de mouchoirs.

Je me rallongeais de nouveau à ses côtés. « Ce que pensent les autres de moi... Ils ont certainement raison. » J'éludais en haussant les épaules. Je savais moi-même que tout ce que je faisais n'était pas parfait, n'étais pas 'éthique', et tout le tralala. Mais je m'en fichais bien. Je ne vivais pas dans ce bloc pourri où il fallait se battre pour se laver les cheveux, pour prendre en compte des remarques de nanas jalouses. Je m'envoyais en l'air avec des mecs, et alors ? Personne ne m'avait jamais demandé de fournir une autorisation écrite de la main de Devon pour faire ça, alors je me le permettais. « De toute façon, je ne me souviens de rien. » Je marquais une pause, et avalais ma salive. « Et quand je me souviendrai, ce sera sans doute horrible. » Je murmurais, tout en me collant au corps chaud de Quinn.

Ce qui me tenait à coeur, maintenant, c'était juste sa présence. Le reste, je m'en fichais bien. « Et puis, je préfère ma version de l'histoire. » Je plaisantais, tout en parcourant mon index le long de son torse, le descendant dangereusement bas, puis en remontant ma main délicatement feignant l'innocence. « Sauf si tu as des regrets pour ta pauvre fiancée. On a qu'à dire que c'était... Je sais pas... Ton amoureuse de quand tu avais 8 ans. » Je rajoutais en glissant ma main dans ses cheveux. A tous les problèmes, il y avait une solution. Et moi, je pouvais me charger de ré-écrire mon scénario comme une magicienne s'il ne l'aimait pas. « Et puis, tu es beaucoup trop beau pour te contenter d'une seule fille, Quinn. » Je concluais, tout en le mangeant des yeux. Il était vrai qu'un mec avec une aussi belle petite gueule ne pouvait pas être l'auteur d'une vie romantique à succès. J'imaginais des drames passionnels pour lui. Peut-être que mon flair me trompait mais si je devais m'inventer une vie, celle-ci était sans doute la plus drôle. Si nos vies étaient liées, je voulais que ce soit ainsi et pas autrement.

Aimer Nyx, c'était accepter le fait qu'une femme forte entre dans votre vie. Elle ne se laissait pas marcher sur les pieds, elle tenait tête, et elle se fichait du regard que portaient les autres à son égard. Nyx était une femme fière, quoiqu'un peu capricieuse. Mais elle savait se satisfaire du nécessaire, car c'était ça la vie aussi au bloc. On ne pouvait pas vivre de nos rêves, et il fallait garder les pieds sur terre. J'aimais le pragmatisme, peut-être un peu trop. Quand je m'évadais, je me perdais, et cela avait tendance à me faire peur. Comme Nyx partageait ce même point de vue, affirmant même sous des caresses insistantes sur ma peau qu'elle ne souhaitait rien savoir de son passé, ça me réconfortait. On se ressemblait peut-être trop, mais on aimait entretenir cette relation plus que charnelle, même les sentiments n'étaient pas au rendez-vous. Elle était tout ce dont j'avais besoin en fait. Nyx remplissait les critères, et n'oublions pas: il fallait se satisfaire du nécessaire. Mais il ne fallait pas prendre Nyx pour une solution de passage, ni-même un bouche-trou. Elle comptait beaucoup à mes yeux ! Je la respectais dans son intégrité, tout comme elle le faisait. C'était simple pour nous, mais peut-être pas pour les autres. De toute façon, qui était au courant qu'on couchait ensemble ? On restait discret tant qu'on le pouvait, et on se fichait que la rumeur se réponde un jour ou l'autre. Nyx se décala sur le côté et je tournai la tête vers elle, savourant ses mains baladeuse le long de mon torse et de mon ventre. Ses mots glissaient fluidement de ses lèvres pulpeuses. J'avais envie de l'embrasser encore une fois. Elle finissait par me flatter, et j'étouffai un rire à sa remarque. Oui, pour elle j'étais plutôt beau gosse, admettons. Hormis Calliope, personne d'autre n'avait passé le cap du physique... Nyx était un peu prIvilégiée dans ce cas. Et ça ne la dérangeait pas au fond, je le savais bien. On s'accordait des libertés entre nous, puisque nous n'étions pas un couple. Mais quand on était ensemble, comme maintenant, on aimait se comporter comme tel. Voilà pourquoi je m'étais redressé pour à mon tour la dominer de ma stature, grimpant sur elle. J'appuyai mes coudes autour de son visage, l'emprisonnant sous mon poids. Je penchai mon visage vers le sien, et je m'appropriai de nouveau ses lèvres dans un baiser plus intense. Les draps glissèrent le long de mon dos quand je me redressai. Je n'avais pas trop froid, le soleil s'élevait de plus en plus dans le ciel. « J'aime tes histoires farfelues. » Je revins l'embrasser, caressant sa joue et ses cheveux doucement. « Mais tu crois vraiment que je mérite une fille aussi belle et intelligente que toi, hum ? » J'esquissai un sourire, lui répondant ainsi sur le ton de la taquinerie. C'était comme ça entre nous. On se provoquait, on se cherchait, pour au final aboutir sur une réaction des plus détonantes. Le charnel prenait le dessus. Le désir prenait possession de nos corps. Nos esprits se consumaient. Et nous ne devenions plus qu'un.

Nous jouions à un jeu d'échec, avançant nos pions, l'un après l'autre pour tester les limites de l'adversaire, pour le tenter, pour le faire tomber dans nos filets. Nos rencontres étaient de longues parties où je tentais de mettre mon roi en échec, et même lorsque le dénouement final tombait, il était toujours en notre faveur. Nous y trouvions toujours notre compte. C'est pourquoi lorsqu'il décida de se placer au dessus de moi, je me contentais de l'observer, curieuse de savoir quel mouvement il tenterait lors du prochain tour.

Mes mains se voulaient baladeuses, et je ne me gênais donc pas pour caresser son dos, le long de sa colonne de vertébrale, jusqu'à ses reins. « Je ne sais pas, je préfère quand tu me le prouves. » Je répondais à son compliment, avec un sourire amusé. Même si Quinn était loin devant la catégorie des mecs qui devaient encore faire leurs preuves, je ne pouvais m'empêcher de le provoquer toujours plus. J'ondulais mon corps contre le sien, puis mes jambes l'emprisonnaient, glissant autour de sa taille. Ma torture se voulait farouche, dangereuse et violente. Mais Quinn ne succombait jamais facilement, ce qui le rendait atypique et spécial pour moi. Nous dansions tous les deux sur la corde sensible, nous tenant, nous bousculant, pour voir lequel tomberait en premier, entraînant l'autre dans sa chute.

Il pouvait choisir sa fiancée parmi toutes les nanas du Bloc, je me chargerais du reste. Mon pouce venait caressait ses lèvres puis son menton, je ne me laissais jamais d'étudier les courbes de son visage, les fossettes qui se creusaient à chacun de ses sourires. Je levais mes yeux vers le ciel, qui se revêtait de sa tunique bleue. « Il nous reste encore un peu de temps. » Je murmurais, à moitié enjouée et à moitié triste. Encore un peu de temps avant que le bloc entier ne se réveille, avant que les portes ne s'ouvrent. Avant qu'il quitte les draps où il avait laissé son odeur, celle dont je pouvais m’enivrer encore et encore. Je préférais ma vie d'insouciance, celle de la nuit.

Mes lèvres parcouraient sa peau d'albâtre. Je savourais son parfum matinal, la douceur de son corps, comme ses mots qui s'échappaient de ses lèvres. Nyx avait toujours eu besoin de plus. Une réelle petite capricieuse, une princesse. Ca devait être difficile de vivre au bloc pour elle. Si précieuse, si fragile aussi. Je comprenais pourquoi elle ne s'aventurait jamais dans le labyrinthe. Elle ne connaîtrait jamais le bloc des garçons. J'étais un peu triste, car j'aurais aimé lui faire visiter, qu'elle rencontre d'autres garçons gentils et qu'elle goûte à notre cuisine. Elle était moins savoureuse que celle des filles, mais était pas mal ! Je lui souris. Ses mains s'aventuraient dangereusement sur mes reins. J'aimais ses caresses. Je n'avais pas envie de partir. C'était toujours comme ça avec Nyx. Quand nous partagions ce genre de moment, on voulait le savourer à tout prix. On s'accrochait comme des sangsues, et on se nourrissait de nos énergies vitales. Nyx comptait étrangement beaucoup pour moi. Son corps n'était qu'accessoire, j'étais tout simplement charmé par sa personnalité détonante. Le vilain petit canard finissait toujours par être aimé, je le savais désormais. Les filles pouvaient ne pas l'aimer, mais personne ne m'empêcherait de l'aimer, moi. Je caressai sa joue, tendre, dans mes pensées. Elle disait que nous avions du temps, je voulais la croire. Et à mesure que le soleil se levait et que le ciel se parait de son bleu clair si distinctif, je l'embrassai avec une extrême douceur, comme si cela suffirait à panser ses plaies au coeur. Ses chagrins. Ses larmes salées. « J'aimerais que le temps s'arrête quand je suis avec toi. » Mes mains glissèrent naturellement le long de ses courbes enjôleuses. Mon visage se cacha dans son cou. Je marquai sa gorge de plusieurs suçons violets, joueur. Hélas, il serait bientôt l'heure pour moi de partir. Je n'avais pas entendu les portes du labyrinthe s'ouvrir, et je n'avais détecté la présence d'aucun blocard près de l'étang. On était vraiment seuls, Nyx et moi, emmitouflés dans cette couverture si chaude et douce. Je fis dériver une main entre ses cuisses. Je caressai son flanc. Je frottai mon bassin contre le sien histoire de la provoquer d'autant plus qu'elle le faisait. J'étais prisonnier de son corps de princesse. Je me redressai, souriant. J'aimais lui résister. « J'ai tellement envie de toi Nyx. » Je la regardai intensément. Aimait-elle se sentir désirée ? Aimait-elle être objet de désir, de fascination ? Je ne savais pas, je n'étais pas dans sa tête. Mais je voulais la sonder toujours plus. Apprendre à la connaître et prévoir ses réactions. Je voulais qu'elle soit mienne pour toujours, tant que je respirerais dans ce bloc. Et qu'une créature belliqueuse tente de me séparer d'elle, et je me battrais pour Nyx. Toujours.

Entre les mains de Quinn, je devenais coton puis soie, poupée puis marionnettiste, tirant les fils puis les laissant se détendre entre ses doigts. Un feulement s'échappait de mes lèvres alors qu'il venait presser les siennes contre mon cou, venant aspirer mon âme. Sa passion signée sur ma jugulaire, comme un artiste couronne son tableau de ses initiales. Sa vengeance était au prix des limites que j'avais frôlé avec malice. Il n'y avait plus loyauté dans notre jeu. Nous étions déjà perdus par avance. Je l'étais dans chacun de ses mouvements de reins qui me hantaient. Enfermée dans cette cage de sensations, je me cambrais face à l’assaut des caresses. Les cellules de mon cerveau s'éteignaient une par une, les lucioles de lucidité se noyaient dans l'étang. Je lâchais prise, posais mon diadème de princesse quelque part, loin dans mon esprit. Mon prince charmant venait de me mettre en échec, mais je savais exactement comment retourner la situation à mon avantage.  

Je desserrai l'étreinte de mes jambes, et une de mes mains se glissait jusqu'à l'objet de sa virilité. Mon visage se redressait pour s'approcher du sien, et ma langue arpentait sa lèvre inférieure, où je venais appliquer quelques morsures. Il avait le pouvoir de m'allumer, et mon corps brûlait à son contact. Je le provoquais toujours plus, dirigeant sa clé de plaisir vers ma serrure, les faisant se frôler, se caresser. A quel point était-il capable de résister ? S'il ne voulait pas, alors je voulais bien abandonner à sa place. L'identité du vainqueur m'importait peu à présent, l’incandescence de son corps contre le mien me rendait fiévreuse. « Fais moi l'amour. » Une supplication, une suggestion, un ordre. Je caressais ses fesses, ses reins. Avec la nature comme seul témoin, je voulais devenir sa Venus, et lui mon Apollon, notre union célébrée sous ce vieil arbre qui allait sans doute se souvenir longtemps de nos ébats.

L'atmosphère s'était alourdie, je sentais le poids de mon désir sur mes épaules. C'était difficile d'y résister. Nyx n'arrangeait rien avec ses petites provocations. Ses ongles parcouraient ma peau. Mon dos se cambrait sous des frissons révélateurs d'un plaisir non-dissimulé. Ses mots s'entrechoquaient dans mon esprit comme une supplication, un ordre, une énième provocation. Elle me rendait fou. Mais pas d'amour. C'était vraiment difficile à expliquer, entre Nyx et moi. Mais quand on s'adonnait à un tel plaisir charnel, nous devenions les amants de toute une vie. Comme si nos corps s'harmonisaient pour ne former qu'une seule entité. J'aimais la posséder, la faire mienne, et la marquer de toute mon âme. Parce que cette dernière se consumait dans des baisers, des caresses. Je divaguais sur elle. Ses mains expertes savaient me guider et m'indiquer précisément ce qu'elle attendait de moi. Elle voulait que je lui fasse l'amour, comme si cela ne lui suffisait pas. Je la comprenais. Bientôt, notre petit moment d'intimité se terminerait, et il fallait en profiter un maximum. Ses doigts glissaient le long de ma virilité, je poussai un soupir rauque. Mon échine se courba sur elle, mon torse frotta sa poitrine avec discernement. Nyx éveillait mes sens les plus primitifs. Je voulais la faire mienne, une fois de plus. Que personne d'autre que moi ne puisse la toucher, et que je lui procure un plaisir inégalable. « Je vais te consommer, te consumer, te posséder... » Comme je savais si bien le faire lorsque nous n'étions que tous les deux. Mes mains dérivèrent progressivement jusqu'à ses cuisses, alors libéré de l'étreinte de ses jambes fines. Je m'agrippai à ces dernières, non sans griffer sa peau avec une certaine impatience. Nyx ondulait précisément des hanches, nos intimités en contact direct. C'était doux et agréable, j'aimais beaucoup cette sensation. On communiquait si bien que je me mis à fortement espérer que personne n'interviendrait. Que la nature seule puisse être seule spectatrice de notre échange si intime. Je pris possession de ses lèvres avec passion, j'adorais comment son corps glissait contre moi, sous moi. J'aimais la savoir prisonnière de moi-même. Je m'émerveillais devant la magnificence de cette femme. Quand elle s'offrait à moi comme ça. Nyx était à moi, juste à moi, pour ce court instant. Je pris soin de la posséder, au plus profond de sa chair, dans un mouvement calculé du bassin. Mon visage se détendit à cette pénétration délicate et coordonnée. Je la regardais. Au moindre signe de douleur ou d'incertitude, j'étais prêt à arrêter. C'était étonnant comment je prenais une grande attention aux réactions des autres. Je ne voulais qu'offrir le bonheur à Nyx. L'était-elle dans mes bras ? Sous cet arbre ? Au pied de cet étang ? Paysage si idyllique, où je lui faisais l'amour comme elle me l'avait si humblement demandé. Tout en ondulant stratégiquement des hanches, à la recherche de ce plaisir que nous voulions partager ensemble, je me demandais si Nyx serait heureuse sans moi. Si elle souriait avec quelqu'un d'autre que moi. Si après tout, elle avait trouvé mieux que moi. Et qu'un jour, peut-être, elle finirait par se lasser de moi. Impossible. Car je savais mieux que quiconque que j'étais gravé dans son corps, jusqu'à la moelle.

Depuis qu'ils avaient été embarqués ici, il ne l'avait plus revu. Cela faisait plus de 48h qu'il ne l'avait pas vu. Où était-elle ? Assis dans le réfectoire il tente de manger sans succès et regarde les hommes postés là du coin de l'oeil. Il finit par se lever et reposer son plateau avant de s'avancer vers l'un d'entre eux. «  Excusez-moi, je pourrais avoir des nouvelles de mon amie ? » Il demande. « Je peux me renseigner, comment elle s’appelle ? » lui répond l’homme. « Go Eun Sun, son nom est Go Eun Sun, on est arrivés ensemble avant hier mais je ne l’ai pas revu depuis. » L’homme hoche la tête et sort de la salle. Le jeune homme soupire et retourne s’asseoir. Quand est-ce qu’il va enfin la revoir? Pourquoi est-ce qu’elle n’est toujours pas là? Il doit la voir, il doit lui parler, et il doit aussi s’assurer que tout va bien, qu’elle n’a rien. Il faut absolument qu’il la revoit sinon il va péter un câble. Ses doigts tapotent la table alors qu’il se sent nerveux. Il faut qu’il la revoit. Il doit.. Les portes s’ouvrent et son regard se pose sur une jeune fille qui entre. Elle semble perdue, et va chercher son plateau repas avant de s’asseoir à table à l’écart de tout le monde. Il fonce les sourcils. C’est elle. Il se lève et la rejoint d’un pas pressé avant de s’asseoir devant elle. « Eun Sun! Tu es enfin là ! », il s’exclame avec un sourire. Il se sent si rassuré de la voir en pleine forme, il commençait à s’inquiéter. « On se connait ? », lui répond la jeune fille.

N.B. : Vous vous rappelez du prénom de votre amie Go Eun Sun